14 février 2022 • FED Group • 3 min

On le sait, le suivi des conventions de forfaits jours par les entreprises est loin d’être une sinécure.

Si la comptabilisation de la durée du travail selon un forfait en jours apporte une souplesse appréciable et indispensable aux entreprises, elle peut rapidement virer au cauchemar lorsque un salarié mécontent soulève devant les prud’hommes la nullité de sa convention de forfait et réclame corrélativement un arriéré d’heures supplémentaires sur trois ans.

Bien que ce contentieux existe depuis plus de 10 ans maintenant et que le législateur ait légiféré, la question reste toujours d’actualité.

En témoigne la récente invalidation par la Cour de Cassation des dispositions de la convention collective du Crédit Agricole sur les forfaits jours .
Cass. soc. 13-10-2021 n° 19-20.561 FS-B : BS 12/21 inf. 710

Pour rappel, Les conventions de forfait en jours sur l’année peuvent être conclues par l’employeur avec :

  • les cadres qui disposent d'une autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps et dont la nature des fonctions ne les conduit pas à suivre l'horaire collectif applicable au sein de l'atelier, du service ou de l'équipe auxquels ils sont intégrés ;
  • les salariés dont la durée du travail ne peut pas être prédéterminée et qui disposent d'une réelle autonomie dans l'organisation de leur emploi du temps pour l'exercice des responsabilités qui leur sont confiées.

Parmi les conditions fixées par le législateur, l’existence d’une convention ou un accord collectif déterminant le nombre de jours travaillés dans la limite de 218 jours.

L'accord collectif autorisant la mise en place de forfaits en jours doit fixer les modalités selon lesquelles :

-  l'employeur assure l'évaluation et le suivi régulier de la charge de travail du salarié ;

-  l'employeur et le salarié échangent périodiquement sur la charge de travail du salarié, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle, sa rémunération, ainsi que sur l'organisation du travail dans l'entreprise ;

-  le salarié peut exercer son droit à la déconnexion.

La Cour de cassation exige quant à elle que l'accord collectif protège la santé et la sécurité du salarié, en garantissant le respect de durées raisonnables de travail et des repos journaliers et hebdomadaires, ainsi que le caractère raisonnable de l'amplitude et de la charge de travail et une bonne répartition du travail dans le temps. 

Rappelons qu’en l'absence de stipulations conventionnelles relatives au suivi de la charge de travail des salariés sous convention de forfait en jours et aux échanges avec l'employeur sur ce sujet, l'employeur dispose d’une faculté de rattrapage ; il peut en effet valablement conclure une telle convention :

-  s’il établit un document de contrôle mentionnant la date et le nombre de journées ou demi-journées travaillées.

Ce document peut être renseigné par le salarié sous la responsabilité de l'employeur ;

- s’il s'assure de la compatibilité de la charge du travail du salarié avec le respect des temps de repos quotidien et hebdomadaire ;

-  s’il organise un entretien annuel avec le salarié pour évoquer sa charge de travail, l'organisation de son travail, l'articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle ainsi que sa rémunération.

On ne le rappellera donc jamais assez, tant la mise en place que le suivi des conventions de forfait jours par les employeurs, doit s’effectuer de façon extrêmement rigoureuse par les entreprises qui y ont recours.

Au-delà du risque de rappel d’heures supplémentaires évoqué ci-dessus, l’enjeu est aussi celui de la santé et du bien-être au travail, au sein de l’entreprise.

Elise Dangleterre
Avocat à la Cour 
www.mouydangleterre.com